HOSTELS A BASECQ

Un peu d'histoire                        

La rapidité des déplacements a rendu inutile l'existence d'hôtels dans une localité aussi petite que Basècles.Il n'en était pas de même au temps des diligences, des carrosses, des chariots lourds et lents, des longs parcours pédestres et des routes semées de fondrières et impraticables dans l'obscurité de la nuit.


La situation géographique de Basècles, à mi-distance entre Tournai et Mons, Ath et Valenciennes, Leuze et Condé, en faisait, malgré le peu d'importance de sa population un lieu tout indiqué comme gîte d'étape.
Aussi ne faut-il pas s'étonner d'y trouver, depuis de longs siècles, au moins un de ces établissements, pompeusement décorés du titre d'hôtel, qui attendaient les voyageurs pour leur offrir de quoi se restaurer, se réchauffer, prendre une nuit de repos.
Il ne faudrait pas y voir des édifices dans le genre des hôtels qu'on connaît actuellement. Ces auberges accueillaient, la plupart du temps pour une seule nuit, colporteurs, journaliers, trimardeurs, charretiers, qui trouvaient là le gîte et le couvert. Plus rarement un voyageur ou un fonctionnaire surpris par la tombée du jour.
Ces modestes auberges de village possédaient presque toujours, comme la plupart des maisons de Basècles anciennement, une étôle1 et un cari2 ainsi qu’un vaste terrain occupé par le jardin et le verger et ne différaient guère des autres maisons du village que par l'adjonction de quelques locaux rendus nécessaires par leur destination : cuisine, salle d'auberge, chambres pour voyageurs, écuries pour les chevaux, cour et remise pour les voitures.

Les hotels 1

Le plus ancien recensement des propriétés de Basècles qui nous soit parvenu est le cartulaire-chassereau3 de 1450 ; il cite trois hôtels : le Cygne, la Clef, le Heaume.

 


[1] etaule à k’vau : écurie
[2] abri pour véhicule
[3] recueil de copies des actes attestant les titres et privilèges d'une personne ou d'une communauté

 

Le cygne                       

En 1450 : le manoir Jehan Potier condist l'ostel au chinne. En 1498, Colart de Bury occupe un manoir et lieu con dist l'ostel au chigne, gisant assez priès dou moustier1. En 1561, Nicolas de le Haye est hoste louager2 du chinne.

En 1575, Thiry du mont tient à censse et leuwaige3 l'ostelz du chine, contenant de jardinage deux bonniers4. L'année suivante, ce dernier tient de feu son beau-père, une maison, cambres5, grange, estable, huissine6 de brasserie, qu'on dist l’ostel du chine, avecq deux bonniers de jardin, houblonnière et pretz.

Cygne 3

 

En 1645, l'hôtel du Cygne, gisant assez près de l'église, est tenu par Jean Leblois, au lieu de son beau-père Jean Delguste. En 1718, la propriété a été divisée ; elle comprend deux maisons à côté, que l'on dit le petit Cigne.

Cygne 1

En 1794, les héritiers d'Adrien Thuin les vendent à Grégoire Mauroy et Marie-Louise Duwelz. A cette occasion, on décrit une dernière fois la propriété: Auberge portant pour enseigne le Cigne : trois places à front de rue, quatre cabinets sur le derrière, une cave, quatre écuries des chevaux, une étable des vaches, une grange, un charri7, jardin, etc., héritage contenant 5 journels, situé à Basècles sur la Place, près de l'église, tenant à la cure du lieu .L'hôtel du Cygne s'étendait donc jusqu'à la cure.

Les hotels 1

Au-dessus de la porte d'entrée, une pierre est encastrée dans le mur : on y lit : Grégoire Mauroy et Marie-Louise Duwelz. 1794. Grégoire Mauroy mourut en 1806, praetor hujus loci8, père de 9 enfants, âgé seulement de 37 ans


  

 

 

[1] église [2] hoste louager : locataire [3] censse et leuwaige : location [4] ancienne mesure agraire correspondant à 4 journels,soit environ 1.33 Ha.
[5] chambres [6] local,pièce [7] Idem à  2 [8] praetor hujus loci : prévôt du lieu

 

 

Le Cerf                        

On ne parle pas de cet hôtel en 1450 ; mais, en 1498, Antoine de le Warde occupe maison et lieu aboutant1 à la chimentière2, tenant à sa maison et hostel con dist L'ostel au Cherf. En 1561, Jehan Richart, censier, est en même temps hostelain du logis du Cerf. En 1623, le Cherf, avec un demi-bonnier, maison et jardin, a pour propriétaire Pierre Ghosselin. En 1645, le curé de Basècles tenait à rente de Saint- Ghislain un petit jardin tenant aux murs de la chimentière, à l'héritage de la maison de cure, à l’héritage du Cerf et à froncq de rue. En 1743, Gilles Bleu, censier, vend   à son fils Louis-Joseph sa forge avec la moitié de sa maison et jardin, l'autre moitié étant à son autre fils Jean-François. Celui-ci était charron, tandis que Louis-Joseph exerçait le métier de maréchal. En 1754, Mansuète Bleu, pour son droit de maîneté3, choisit la maison anciennement nommée le Cerf, contenant un journel. On voit que l'enseigne du Cerf n'existait plus, et que la propriété avait été diminuée par des amputations.

Le Heaume                    

    Heaume

La veuve Lambert Grigou est, en 1450, propriétaire d'un manoir4 et lieu condist au hyaume . Sa situation est indiquée dans un autre article du même cartulaire : la veuve Piérart Pouille, possédait une terre de 5 journels, nommée le courtil de Mortaigne, faisant le tournant de la rue de Garfontaine tenant vers le moustier al hostel au hiaulme, vers midi as murs de le court de Basècles vers occident à Nicaise Bourgois. Cela nous permet de localiser l'hôtel du Heaume. En 1498, Jehan Regnart, est inscrit pour son manoir et lieu condist l'ostel au hiaulme tenant vers le moustier à la court5 de Basècles, et d'aultre part à ung courtil6 ahannable7 qui est à l'église paroissiale de Basècles.

 

 

[1] touchant,contigu  [2] cimetière >[3] avantage qui appartient au plus jeune des enfants dans les successions 
[4] propriété à laquelle est jointe une certaine étendue de terre  [5] Terrain cultivé (souvent clos)   [6] idem  [7] labourable

Le Mouton Blanc                        

Cette auberge occupait l'autre bout du terrain compris entre la chaussée et le bas-chemin. La propriété comprenait 80 verges. En 1720, Joas Hermant tient l'auberge dite le Mouton Blanc. En 1732, elle appartient à J-B. Place, cabaretier à Basècles, On dit que le bien tient à la chaussée de Mons de deux sens (ancienne chaussée). En 1776, l'auberge tient à la chaussée et au bas-chemin. Cette fois, la nouvelle chaussée était faite, et le Mouton Blanc n'y tenait plus de deux sens.

Mouton 1

Le Loup                        

L'hôtel du Loup n'est signalé ni en 1450 ni en 1498. On mentionne pour la première fois, en 1575, la maison hostellerie du Loup, contenant 80 verges. On le décrit comme suit en 1576 : maison, cambres, édifices, huissine de cabaret, portant pour enseigne le Loup .En 1599 et 1602, Maître Jean Reptin est héritier de l'hôtellerie du Leup. En 1628, Georges Broucq fait relief de maineté pour une maison, cambre, grange, estable et brasserie, nommée le Leup, gisant à Basècles, tenant à Monseigneur de Saint-Ghislain et par devant à la chaussée allant de Mons à Tournai. En 1645, Jean Lambert occupait l'hôtel du Loup, à l'opposite du Cigne. Le 19 février 1652, Cornil Duwelz, laboureur, demeurant à Basècles achète une brasserie, estables, jardin et héritage vulgairement nommé l'hostellerie du Loup, dans tel état que les ennemis français l'ont aboly1 et ruynée l'an 1649.

Le loup 2

Le 25 avril 1664, le feu prit à l'hôtellerie de Loup et dévora du même coup l'hôtel de l'Empereur et la grande cense de Monsieur le prélat de Saint-Ghislain, outre une petite maison voisine. Enfin, en 1786, le Loup appartient à Jean Destrebecq ; il y était encore quand la grande cense fut vendue par les Révolutionnaires.

 

 

 

[1] détruit

La Clef (plus tard, la Clef d'Or)                 

La cle

L’ancienne gendarmerie et les maisons qui lui faisaient face entre la grand-Rue et la rue A. Gors occupaient l'emplacement de cet hôtel. En 1450, Giliart Macheclier occupe un manoir et lieu condist l'ostel à le clef séant devant le puch1, tenant vers les préaulx2au manoir Jakemart, boulengier. En 1498, c'est encore Giliart Macheclier, et on répète que l'ostel à le clef est devant le puch de la ville et aboutit as rues. En 1575, Jehan Benoit fils est héritier d'une maison avec jardin, portant pour enseigne la clefz, comprenant 3 journels . En 1591 et 1623, Jean de Bury est propriétaire d'une maison, jardin et lieu, dite la Clef. En 1645, il est remplacé par sa fille Antoinette. Outre la maison et héritage portant l'enseigne de la Clef, elle possède un jardin où y eult cy-devant une maison portant l'enseigne de la Clef faisant le toucquet3 de la rue allant à Keuvaucamps et tirant vers le puicb de la ville. Ces deux parties allaient désormais s'appeler la vieille et la nouvelle Clef. En 1651 on mit en adjudication l'arrentement perpétuel d'une maison, chambre, jardin et héritage appelé la Clef et un jardin y tenant nommé la vieille Clef, contenant trois journels trente verges4, enclos de haies, tenant au grand chemin de Mons de deux côtés, une ruelle allant à Mons passant parmy5. C'est cette ruelle qui est devenue en 1766 la nouvelle chaussée (actuellement Rue Grande, de l’ancienne gendarmerie à Quevaucamps). Elle séparait la nouvelle Clef de la vieille Clef. En 1660, tout l'ensemble était appelé une masure, gisant à front de rue, nommée la vieille et nouvelle Clé contenant ensemble un bonnier ou environ. En 1670, l'occupant était Pierre Largepret . En 1733, son enseigne est devenue la Clef d'or. En 1747 J-B Cardon censier6 et hostelain7 de la Clef d'or ne pouvant payer la rente de 100 livres dont l'hôtel était grevé,on mit le bien en criée publique. L’adjudicataire vendit la Clef  en 1754   à Jean Mercier, maître tailleur de pierres. Le marché comprenait la vieille Clef  tenant au vieux chemin de Mons à Tournai.

 

Saint-Arnould             

L'auberge de Saint-Arnould était une annexe de la ferme8 de même nom et se situait en face de la Ferme Saint-Martin.

 

 

[1] puits [2] petit pré, petite prairie  [3] coin [4] ancienne mesure agraire correspondant à environ 1/100e de journel [5] au travers 
[6] locataire [7] hôtelier, aubergiste  [8] ferme Patin du Faubourg

L'Empereur                  

Empereur 001

Cette maison est toujours décrite comme située devant l'église, comprise entre la chaussée et le bas-chemin, et tenant par devant au wez qui est devant la porte de la court de Basècles. Il y avait là, entre l'église et le bas-chemin, un wez, c'est-à-dire un abreuvoir. Il y avait déjà une maison à cet endroit en 1450, mais ce n'est qu'en 1664 qu'on y mentionne un hôtel appelé l'Empereur, qui fut incendié alors en même temps que le Loup et la grande cense. En 1708, l'Empereur est donné en arrentement. A ce moment, il comprenait encore maison, trois chambres, brasserie, lieu et héritage dit l'Empereur, contenant 50 verges. En janvier 1738, François Daudergnies, mayeur de Basècles, achète une masure et héritage, contenant 80 verges, tenant à la chaussée de Mons-Tournai, au wez, à Jacques Mauroy et au bas-chemin, portant ci-devant pour enseigne l'Empereur. En 1757, on en avait fait deux maisons ; elles sont vendues au mayeur de Basècles.

La Couronne Impériale                  

Couronne3

Peu avant 1784, Albert Demartin avait acquis en trois fois une petite propriété de 16 verges tenant à la cure, au cimetière, à l'église de Saint-Nicolas de Mons (la houblonnière), à Jacques-Pancrace Legrand, et à Mansuète Bleu (hôtel du Cerf). Il y fit ériger un bâtiment à deux étages avec plusieurs écuries, et y installa une auberge sous l'enseigne de la Couronne Impériale.
Après la Révolution, il y eut l'hôtel de la Couronne, qui était tenu en 1839 par un Mauroy, sur le même emplacement où il y avait encore un cabaret portant la même enseigne jusqu’aux années 1980. En 1860, le Conseil communal se réunissait à l'auberge de la Nouvelle Couronne, chez Philibert Dubruille.

Hôtel Delmée                  

Delmee 1

Il occupait l'emplacement de l'ancien hôtel du Cerf. Des correspondances adressées (de Paris et de la banlieue de Tunis !) à un ingénieur nommé Louis Ménard attestent de l’existence de cet établissement en 1908.

Hotel delmee 1908

Il existait encore en 1937 car l’abbé Gorlia le mentionne dans son Histoire de Basècles.

 

Au Boutchot                  

Boutchot 1

Au centre du village, bordant la Chaussée de Tournay à Mons (actuellement rue Grande), une auberge-estaminet dite Au Boutchot a existé jusqu’en 1929 à l'emplacement de l’ ancienne boucherie Detemmerman. En 1911, Philippe Delépine, aidé par sa fille et son épouse Adèle Gras (dite Adèle du Boutchot), en assurait la tenue. Ce modeste établissement prenait jour par une fenêtre de chaque côté de la porte centrale à laquelle on accédait par trois degrés de pierre locale dont les premiers s’arrondissaient largement sur le trottoir. Dotée d'un étage percé de quatre fenêtres, l'auberge disposait d’une écurie, annexe indispensable établie en bordure d’une ruelle, aujourd’hui disparue, qui débouchait sur la Porte-à-camps. Ursmar, célibataire et frère d'Adèle, à qui il a survécu, en a été le dernier propriétaire.

Bouton ensavoirplus

 

 

Hôtel de Paris                

Situé en face de la gare de Basècles-carrières, il existait déjà avant la Première Guerre puisqu’il fit l’objet d’une carte postale éditée par Michel Bleecks en 1907.

Hotel de paris gare de basecles carrieres copie 2

Au Gambrinus                  

Grand rue vue vers l eglise 106 1

Entre la fin des années ‘60 et le milieu des années ‘70 le Gambrinus exerça en plus de son activité de café-brasserie celle d’hôtel-pension-restaurant. La clientèle était surtout composée de techniciens étrangers, allemands pour la plupart, occupés au montage de matériels aux usines Battaille, et de militaires en transit d’arrivée ou de départ du Shape.

 

 

 

Etat des lieux                

Au début du siècle dernier les vestiges de la plupart de ces hôtels étaient encore visibles dans les rues du village. La modernisation et les destructions d’immeubles ont, souvent malencontreusement, détruit à jamais ces traces de notre patrimoine. Des établissements les plus anciens (XVIIIe) ne subsistent, en partie, que :

• du « Cygne » : l’actuelle « maison paroissiale » qui constitue la partie gauche de l’enseigne du Cygne. La partie droite a été démolie après la dernière guerre pour faire place aux Ets Camille Saffre.

• du « Loup » : le « Vié Basecque » dont les élégants chiens-assis (lucarnes passantes) ont été inopportunément remplacés par des tabatières modernes.

• de « l’Empereur » : le café de même nom et le commerce d’optique Cardon.

La bâtisse qui abrita l’ « hôtel de Paris » résiste toujours, orpheline de sa gare voisine, au coin de la placette de Basècles-carrières.

Hotel de paris gare de basecles carrieres copie 2Bas car placette 1

 

 

 

 

Sources                

►Gorlia, Joseph (1938),Histoire de Basècles - Village de la châtellenie d'Ath.Fontaine-l'Evêque:L.Daisne,passim.
►Leblois,Jean(1972),Basècles bâti sur roc .Péruwelz:Impr.Colin,passim.
►Willems,Roger (2002).A Basècles, dans l'ancien temps...Une auberge et une ruelle oubliées ,Revue ASPB n°87,passim.
►Destrebecq,Claude ,Basècles,Cartes postales anciennes.

 

Date de dernière mise à jour : 05/07/2021

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